Notice de
Didier Pralon, "Les Cahiers du Claix" nov. 1993
Les Iliades de Homere, poete et grand hystoriographe.
Avec les prémisses et commencements de Guyon de Coulône, souverain
hystoriographe. Additions et sequences de Dare Phrygius et de Dictys de
Crete. Translatee en partie de latin en langage vulgaire, par maistre Jehan
Samxon, licencié en loys, lieutenant du bailly de Touraine a son siege de
Chastillon sur Yndre, Jehan Petit, avec privilege. On les vend à Paris en la
rue Sainct Jacques. A l'enseigne de la fleur de lys.
Puisqu'Homère est un "hystoriographe",
versificateur par accident, on peut le translater du latin, lui ajouter des
compléments tirés d'autres "hystoriographes" comparables, fussent-ils des
faussaires ! la lettre n'importe guère. Le texte ainsi translaté a pourtant
la verve du conte :
"Alors que toutes les copies et compaignies
militaires des Troyens furent rendues chascune a part soy soubs leur prince
ou chief de guerre, et que les batailles furent ordonnées ils prindrent leur
voie et leur chemin vers les Gregeois avecques une grande sublevation de
bruit et clameur semblable au cry qu'ont acoutusme faire et donnent les
grues qui sont portees en l'air quant en fuyant le hyvere ou climat hyvernal
elles s'en vont volans au temps matutinal de caterve en caterve jusques à la
mer oceane et deliberees de donner une cruelle et dure bataille et ung grant
assault mortifere aux pygmeens. Mais les Gregeois sans rendre aucune clameur
mais comme fervens d'une ire tacite se diligenterent de venir contre les
Troyens pensans en leurs couraiges la maniere et comment ils pourroient bien
vaincre leurs ennemis et de eux et les leurs deffendre. A la venue desquels
et à leur arrivement telle quantite de pouldre fut excitee mesment a ce
aidant le vent que lors leur veue ne pouvait dilater ne protendre oultre le
gect d'une pierre ains fut lors faicte obscurite en la maniere que ausser
faict les nues nocturnes sur la haultesse des montaignes."
Le style
reste archaïque, souvent si gauche qu'il en revêt un charme suranné. Le
texte n'est pas traduit, mais paraphrasé. Jehan Samxon affectionne les
redondances qui forment une mélopée. Les éléments du sens subsistent dans
leurs grandes lignes : le contraste entre le tumulte et le silence, la
comparaison avec les grues et les Pygmées, l'obscurcissement sous l'effet de
la poussière. Mais la comparaison avec le Notos, l'évocation des bergers et
des voleurs sont effacées ; et surtout, le premier d'une longue liste, Jehan
Samxon réorganise le récit pour n'évoquer d'emblée que les seuls Troyens.
Nonobstant son attrait, ce texte vieillot s'apparente plus au style de
Dictys et des romans en prose médiévaux qu'à la poésie d'Homère