|
Naissance le 7
Juillet 1887 à Vitebsk (Russie blanche) de Marc Chagall.
L'œuvre de Marc
Chagall est illuminée par les images de son enfance heureuse, passée
dans la petite ville de Vitebsk, en Russie. D'origine juive, il menait
dans le ghetto une existence relativement libre, au sein d'une famille de
condition modeste, qui toutefois ne connaissait pas la pauvreté. C'est un
univers plein de chaleur et de foi qu'il décrit dans son autobiographie
(Ma Vie, 1921), un univers entièrement baigné par la tradition
hassidique, courant mystique venu d'Europe centrale selon lequel l'omniprésence
du Dieu caché se révèle dans les merveilles du monde.
Les séjours passés à la campagne, chez son grand-père, ont marqué son
imaginaire. Son oeuvre témoigne de la fascination qu'exerçaient sur
l'enfant les animaux de la ferme. A Vitebsk, le jeune Chagall entre dans
l'atelier de Pen, pour y étudier le dessin et la peinture. Déjà, il
puise son inspiration dans la vie familiale et l'observation du quotidien
(La Femme à la corbeille, 1906-1907; Mariaska, 1907; Le Mariage, 1909).
Mais peu satisfait de l'enseignement qu'il reçoit, il part étudier à
Saint-Pétersbourg. Comme juif, il doit obtenir un permis de séjour, et
pour cela trouver un emploi. Par chance, il rencontre l'avocat Goldberg
qui le prend chez lui comme prétendu domestique, lui laissant tout loisir
de suivre le cours de peinture de Nicolas Roerich, puis de Léon Bakst.
Auprès de ce dernier, décorateur des ballets russes fondés par Serge de
Diaghilev, il trouve plus de liberté et affirme sa vision de coloriste.
La revue Zol toe Runo (La Toison d'Or), lui fait connaître les peintres
novateurs de Paris (Cézanne, Van Gogh, Lautrec, Matisse) . A travers leur
exemple, Chagall découvre le pouvoir expressif de la couleur (Le Nu
Rouge, 1908; Le Mort, 1908).
En 1910, un mécène, Vinaver, lui offre une bourse pour séjourner à Paris. Chagall s'y rend
l'année suivante, et trouve un atelier à La Ruche, où résident la
plupart des futurs maîtres de l'école de Paris.
Il y rencontre aussi Guillaume Apollinaire, dont il écrira avec humour
qu'il portait « son ventre comme un recueil d’oeuvres complètes ».
Apollinaire reconnaît d'emblée le talent du jeune peintre. Chagall est
aussi l'ami du poète Blaise Cendrars qui lui consacre en 1913 son Quatrième
poème élastique et titre les tableaux de cette période.
A Paris, Chagall découvre la peinture de Cézanne et les nouvelles
recherches des peintres cubistes. ll retiendra certains principes de leur
construction rigoureuse, sans renoncer pour autant à son imaginaire (A la
Russie, aux ânes et aux autres, 1911-1912 ; Moi et le Village, 1911-1912).
En 1914, à la fin de son premier séjour à Paris, il envoie à Berlin à
la Galerie Der Sturm, qui réalise sa première exposition, tout un
ensemble de peintures et de dessins.
Chagall, qui avait
regagné Vitebsk pour y épouser Bella Rosenfeld, se voit contraint de
rester en Russie à cause de la guerre. En retrouvant le monde de son
enfance, il revient à une sorte de réalisme (La Maison grise, 1917; Le
Cimetière, 1917; La Mère, 1914). Lorsqu'il expose ses toiles à Moscou,
en 1915, il étonne les jeunes artistes par la sobriété de son art.
Dès 1917 cependant il donne la mesure de sa liberté créatrice à
travers les toiles inspirées par l'amour qu'il porte à sa jeune épouse
(Les Amoureux au-dessus de la ville, 1915 ; La Promenade, 1917).
Lorsqu'éclate la Révolution de 1917, Marc Chagall devient Commissaire
des Beaux-Arts de la région de Vitebsk sur la proposition de
Lounatcharsky, responsable du ministère de la Culture qu'il avait
rencontré précédemment à Paris.
De retour à Vitebsk, Chagall fonde une école d'art, faisant appel à des
peintres de toutes tendances. Devant la réaction négative de certains de
ses collaborateurs, et de Malevitch en particulier, il s'installe à
Moscou et travaille pour le Nouveau Théâtre Juif. Il y réalise une série
de décors et de costumes de théâtre, libérés des conventions et de
l'anecdote. Mais les difficultés de la vie en Russie s'accroissent et le
couple émigre à Berlin. Chez l'éditeur Cassirer, Chagall exécute alors
ses premières eaux-fortes, qui illustrent son ouvrage autobiographique Ma
vie (1922).
Toutefois le séjour allemand sera de courte durée. Bientôt il reçoit
un télégramme de Cendrars : « Reviens, tu es célèbre, et Vollard
t’attend». Avec Bella, il va retrouver Paris, son « second Vitebsk ».
De retour en France en
1923, Chagall s'installe dans un atelier et retrouve Sonia et Robert
Delaunay, Marcoussis, Gris. Il s'intéresse à la naissance du surréalisme,
mais se heurte très vite à l'hostilité du mouvement à l'égard de tout
mysticisme. Son amour pour Bella inspire plus que jamais son oeuvre. Les
sujets reflètent le bonheur d'aimer et de peindre. La tonalité se fait
plus claire, les contours s'assouplissent, les contrastes sont moins
violents (Ida à la fenêtre, 1924 ; Le Rêve, 1927; Les Mariés de la Tour
Eiffel, 1928).
Dans le même temps Chagall voyage beaucoup et découvre le paysage français ;
les fleurs abondent dans les toiles de cette époque. A la demande
d'Ambroise Vollard, le grand marchand, il réalise plusieurs séries
d'illustrations, d'abord pour les Ames Mortes (1924-1925) de Gogol, puis
pour Les Fables (1931) de La Fontaine, enfin pour La Bible (1931-1952).
Après un voyage en Palestine, il exécute une série de gouaches. 105
eaux-fortes seront par la suite exécutées dont une première série de
66 planches en 1939. L'ouvrage est terminé en 1957 par Tériade,
successeur de Vollard.
La deuxième guerre
mondiale et les menaces qui pèsent sur les communautés juives obligent
la famille Chagall à fuir à New York en 1941. La guerre et les persécutions
inspirent à l'artiste des scènes douloureuses comme les crucifixions
(Obsession, 1943 ; Crucifixion jaune, 1943), et des scènes villageoises
qui, éclairées par les incendies tout proches, semblent autant de
pogroms.
A New York, le peintre découvre la lithographie en couleurs, il réalise
à nouveau des décors et des costumes de scène, pour le ballet Aleko
d'après un argument de Pouchkine en 1942, et pour L'Oiseau de feu, sur
une musique de Stravinsky.
Toutefois le séjour américain sera dramatiquement marqué par la mort de
Bella. Pendant plusieurs mois, il cessera de peindre.
Une première rétrospective
de son oeuvre en 1947, au musée national d'art moderne, donne à Chagall
l'occasion de revenir à Paris. Il s'installe désormais en France, résidant
d'abord à Orgeval, puis en Provence à Vence et enfin à Saint-Paul. L'équilibre
trouvé dans son mariage, en 1952, avec Valentina Brodsky -Vava- et la
lumière méditerranéenne vont nourrir une vitalité créatrice sans
cesse renouvelée.
Il aborde la céramique et la sculpture (1950-1969).
L'œuvre prend une ampleur exceptionnelle. Ce sont les grandes suites
lithographiées dans l'atelier parisien de Mourlot qui illustrent Daphnis
et Chloé (1959-1961) The story of the Exodus (1966),Le Cirque(1962-1966),
dont il écrit lui-même le texte, L'Odyssée (1974-1975).
A partir de 1956 l'art de Chagall prend une dimension monumentale.
L'artiste découvre le vitrail et la mosaïque. Il trouve dans ces
techniques le mode d'expression privilégié de son inspiration biblique
que mettent en oeuvre les maîtres verriers Charles Marq et Brigitte
Simon ; (église d'Assy, 1956-1957; cathédrales de Metz, 1958-1968 : de
Reims, 1973-1974 ; synagogue de Jérusalem, 1960...).
Sur le thème d'Ulysse, il réalise pour l'Université de Nice une mosaïque
de 11 mètres de long qui est inaugurée en 1969, précédant l'ouverture
du Message Biblique en 1973.
Par la magie des couleurs et leur gravité méditative l'oeuvre atteint désormais
à l'universalité que Chagall n'a cessé de poursuivre.
Funérailles de Marc
Chagall à Saint-Paul de Vence le 1er avril 1985. L'artiste repose dans le
petit cimetière du village baigné par la lumière méditerranéenne
qu'il a tant aimée.
|
|
|